Qui a dit que nous devons utiliser un poids qui nous permette de réaliser 6, 8 ou 10 reps consécutives ? Qui a dit qu'une répétition doit immédiatement être suivie d'une autre ? Pour la plupart d'entre nous, ces questions ne seront pour ainsi dire que des fleurs de réthorique. Nous savons tous qu'en Bodybuilding, il n'y a pas de règles fixes, des normes inaltérables, et pourtant nous suivons un entraînement traditionnel, conventionnel, d'après le principe de l'imitation pure et simple.
Vous me direz peut-être : "Pas besoin de signaler qu'après une répétition vient la suivante, cela tombe sous le sens !" Eh bien, dans notre sport rien ne tombe sous le sens, rien n'est d'une logique parfaite, rien ne va de soi. Soulever 200 kg n'est pas la chose la plus normale du monde. Avoir un tour de bras de 55 cm, non plus. Le culturisme n'est pas tenu de sauvegarder des traditions ancestrales et moins encore de se complaire dans l'immobilisme. Qui plus est, si vous voulez progresser le plus rapidement possible, je vous conseille d'éviter toute approche conventionnelle de l'entraînement.
Comme vous le savez, l'intensité de l'effort est la clé qui nous permet de développer des muscles fort et volumineux. L'intensité, non pas la durée, est le facteur qui est à la base de la croissance. L'exercice aux poids soumet nos muscles à un stress considérable qui détermine dans notre organisme une réponse d'adaptation. Celui-ci bâtit un physique plus musclé, capable la prochaine fois de faire front au stress des poids sans être complètement épuisé en fin de séance.
Au fur et à mesure que nous nous adaptons au stress en salle, nous devrons aussi augmenter l'intensité de l'exercice, afin de stimuler constamment le processus d'adaptation.
L'organisme se protège efficacement de toute atteinte portée contre ses structures (poids), se réapprovisionne des ressources énergétiques qui lui permettront de tolérer l'effort, bref, il construit une sorte de ligne défensive pour parer à toute éventualité.
Toutefois, si cette barrière s'avère à elle seule capable de faire face au stress, l'adaptation et la croissance s'arrêtent.
Autrement dit, quand le corps manipule des poids sans une tension excessive, il n'est plus obligé de s'occuper de ses positions de défense et cesse de s'adapter.
L'adaptation est une loi universelle que la nature applique constamment et qui comprend trois phases : la première c'est le stimuli, c'est-à-dire, le signal d'alarme. Le deuxième, la résistance ou adaptation et la troisième, l'épuisement.
Par exemple : quand nous nous exposons aux rayons solaires, ceux-ci produisent une certaine rougeur dans l'épiderme, qui s'enflamme. Voilà le signal d'alarme, le stimuli qui fait réagir l'organisme. Ce dernier a recours à tous les mécanismes nécessaires pour se protéger de ce qu'il interprète comme une agression. Résultat : le bronzage, qui préserve la peau du soleil.
Or, si le bain de soleil a été trop long, empêchant ainsi l'organisme de réagir pour se protéger, il se produira une insolation, un coup de soleil, des brûlures cutanées. Voilà donc la troisième phase, celle de l'épuisement.
Encore un exemple : si vous soumettez les paumes de vos mains ou les plantes des pieds à un frottement régulier contre une surface rugueuse, votre organisme réagira au signal d'alarme en formant des callosités. Mais si la friction est excessive, vous érodez la peau au point de la faire disparaître.
Comparons maintenant ces exemples à une séance de musculation. La manipulation des poids constitue la phase d'alarme, les stimuli auxquels notre corps réagit en construisant des muscles capables de faire front à l'attaque. Mais si l'entraînement est excessif, s'il empêche l'organisme de s'adapter, ce dernier subira une perte de force et de masse musculaire.
Si d'autre part, les stimuli de la première phase ne sont pas suffisamment intensifs, la réponse d'adaptation n'aura pas lieu non plus.
Un bain de soleil trop court ne stimulera pas le bronzage et s'il est trop prolongé, il provoquera de graves brûlures. Un léger frôlement ne suffira pas à produire des callosités, mais une friction violante érodera la peau.
Si vous ne progressez pas ces derniers temps, c'est peut-être que :
L'intensité de votre entraînement ne suffit pas à générer une réponse d'adaptation.
Vos séances d'entraînement sont plutôt longues et sans le repos nécessaire qui vous permettrait de récupérer.
Vous réalisez des entrainements à faible intensité, mais très longues durée.
Si c'est l'un de ces trois cas, il vous faudra réviser à fond votre entraînement. En tant que culturiste, notre ligne de défense sont nos muscles. Le corps ne les maintiendra jamais plus volumineux qu'il n'en a besoin. Nous devons donc lui fournir une raison de s'adapter. Si nous ne le faisons pas, notre organisme n'aura aucune raison de changer sa composition actuelle.
Un débutant, surtout s'il n'a aucune expérience athlétique, fera des progrès avec n'importe quels stimuli. Même s'ils sont faibles, ils provoqueront une réponse d'adaptation. Ses muscles prendront du volume et gagneront de la force très rapidement.
Le passage de l'inactivité à l'entraînement, même faiblement intense, représente pour le corps du débutant un considérable "changement d'habitudes". Pendant un temps, le débutant n'aura pas la moindre difficulté à progresser, pourvu qu'il ajoute régulièrement du poids à ses exercices et récupère entre ses séances.
Au fur et à mesure qu'un culturiste se développe, la formule en salle devient plus complexe. Elle exercera un plus grand stress sur le sportif, sans toutefois amener de notables changements physiologiques.
En fait, plus un culturiste sera volumineux, moins il devra s'entraîner. C'est logique, car plus la masse musculaire sera considérable, plus la dépense d'énergie et le danger de surentraînement seront grands. Une formidable musculature qui se contracte a besoin d'énormes quantités d'énergie et d'oxygène, en même temps qu'elle produit des déchets en abondance. Par conséquent, les entraînements doivent être courts pour ne pas porter atteinte à la capacité de récupération, mais intensifs pour continuer à provoquer une réponse en termes de croissance.
Et voilà que maintenant nous nous retrouvons face à un énigme dont l'explication est très simple, mais que beaucoup ne sont pas capables de comprendre : le danger de surentraînement s'accroît avec la prise de masse musculaire et de force.
On serait peut-être tenté de croire qu'un bodybuilder de 120kg est non seulement plus fort, mais aussi capable de travailler davantage et de mieux récupérer, qu'un autre de 70kg.
Eh bien, physiologiquement parlant, ce n'est pas possible ! Il est plus fort eu peut par conséquent soulever des poids plus lourds et générer une plus grande intensité lors de ses contractions, mais sa capacité de récupération ne s'accroît pas dans la même mesure que sa force et masse musculaire.
La raison en est simple : maintenant qu'il est très fort et volumineux, une de ses contractions équivaut à 10 du culturiste de 70kg. C'est-à-dire qu'il épuise beaucoup plus vite ses ressources énergétiques.
L'énigme une fois éclairci, vous savez maintenant pourquoi un culturiste se heurte à des obstacles de plus en plus difficiles à surmonter dans sa progression, au fur et à mesure qu'il devient plus volumineux. Tôt ou tard, le problème se posera d'intensifier notre entraînement pour déclencher les processus d'adaptation, sans cependant épuiser les ressources que nous réservons pour la récupération.
Nous devons forcer les muscles à travailler à leur capacité maximale, mais sans réaliser un tel travail qu'il épuise toutes nos ressources.
Jetons un coup d'oeil à une série conventionnelle : lors d'un set de 6, 8 ou 10 reps, les premières sont relativement faciles à effectuer. Au fur et à mesure que la série approche de sa fin, les muscle exercé est de plus en plus épuisé, à cause de la fatigue, bien sûr, mais dû surtout à l'accumulation d'acide lactique. A un moment donné, il ne pourra plus se contracter.
Dans une série classique, ce n'est que la toute dernière rep, celle où nous sommes contraints d'utiliser toutes nos fibres musculaires pour la compléter, qui déclenche le processus d'adaptation.
Les précédentes n'y parviennent pas, parce que le muscle est capable de les réaliser facilement avec les ressources dont il dispose. Il n'a donc pas besoin de grossir. Par contre, cette dernière productive rep, atteint la faillite musculaire, et cela non seulement à cause de notre incapacité de soulever le poids, c'est la répétition la plus intéressante pour nous, car elle regroupe pour l'action un nombre maximal de fibres musculaires, mais parce que le muscle est gorgé de l'acide lactique qui s'est accumulé lors des reps précédentes.
Le problème c'est qu'entre les contractions, lors d'une série de reps successives, la quantité de sang qui arrive au muscle diminue. Il n'y a pas suffisamment de temps entre les reps pour que le sang irrigue le muscle et emporte les déchets produits par la contraction musculaire.
D'autre part, pour intensifier la contraction, celle-ci doit être explosive, non pas lente, car cela réduirait la dureté de l'effort.
Je vous propose une solution pas commun, mais très efficace, pour stimuler la croissance et la force ; des séries d'une rep maxi.
Le désavantage des séries classiques, c'est que lors de la dernière répétition (la seule qui stimule la croissance), le muscle est très limité dans sa force et capacité de contraction pour la fatigue et l'acide lactique, problème qu'on peut résoudre en effectuant des sets d'une seule répétition maximale ou, mieux encore, de plusieurs.
Comment réalise-t-on une rep maxi ? C'est facile. Depuis la première rep, utilisez votre poids maximal pour une seule répétition. Et n'oubliez pas de soigner la technique ! Une fois réalisée la rep maxi, reposez-vous en position pendant dix secondes, temps suffisant pour que la circulation sanguine élimine les déchets produits par la contraction et oxygène le muscle, qui sera de nouveau prêt pour la rep maximale suivante.
Encore dix secondes de repos pour le drainage d'acide lactique et l'oxygénation du muscle.
La fatigue musculaire se fera bientôt remarquer. Pour pouvoir continuer, vous prolongerez le temps de repos de 5 secondes, ou enlèverez un peu de poids, ou les deux choses à la fois.
N'essayez surtout pas de réaliser une série de reps maxis avec le même nombre qu'une série classique, c'est-à-dire 6, 8 ou 10 reps. Cela vous empêcherait de travailler avec une intensité maximale. Ne faites pas plus de 5 répétitions et jamais moins de 3.
Avec une seule série d'une rep maximale, vous obtiendrez la même réponse d'adaptation qu'avec trois, quatre ou cinq séries conventionnelles en les portant à la faillite absolue. Mieux encore, ces séries seront bien plus efficaces pour la simple raison que vous manipulerez un poids plus lourd et les stimuli reçus par le muscle seront bien plus intenses.
En outre, vous dépenserez un quatrième de l'énergie nécessaire pour des séries classiques. Cela signifie une meilleure récupération et par conséquent, une capacité de croissance accrue.
Est-ce la méthode idéale ? Dans certaines conditions, elle l'est sans aucun doute. Elle a bien sûr aussi ses restrictions et contre-indications. Premièrement, ce n'est pas un système pour des débutants. Comme vous le savez, ils grossissent avec des méthodes simples. Même un culturiste intermédiaire ne doit pas avoir recours aux séries de reps maximales.
C'est une méthode pour les culturistes avancés. Je ne veux pas dire par là qu'elle ne doive être appliquée que par des hommes pesant 120kg ou ayant remporté des titres importants.
Par "avancés", j'entends des culturistes qui s'entraînent assidûment depuis plusieurs années, qui ont essayé les méthodes les plus diverses et ont acquis une certaine force et tolérance au stress.
Mais même si c'est pour des avancés, je recommande de suivre certains principes lors de la réalisation des reps maximales :
Échauffez bien le muscle avant.
Ne faites pas plus d'une série par groupe.
Ne travaillez qu'un seul groupe avec ce système.
Changez d'exercices à chaque séance.
Ne travaillez pas plus de six semaines avec ces séries. Reprenez ensuite votre entraînement habituel.
N'utilisez pas cette méthode avec tous les muscles à la fois. Je vous recommande de le faire tout au plus avec deux groupes - pécs et biceps, par exemple, afin de n'effectuer que deux séances par semaine. Entraînez les autres muscles comme d'habitude.
Exécutez chaque rep le plus strictement possible, sans tricher, sans impulsion. Chaque rep doit représenter 100% de la capacité maximale du muscle.
Ne répétez pas une séance pour un même groupe avant une semaine.
Si vous réussissez pas à bien calculer le poids et l'effort pour une série de reps maxi, arrêtez, parce que vous pourriez vous blesser ou vous surentraîner.
Deux séries mal faites n'équivalent pas une bien exécutée. Prenez vos notes dans le journal d'entraînement pour la prochaine fois, mais n'ajoutez pas davantage de travail.
Les séries d'échauffement devraient vous aider à quantifier le poids correct pour une série de reps maxi.
Eh bien, voilà mon approche peu orthodoxe de l'entraînement. C'est une méthode efficace pour stimuler la croissance, surtout chez ceux qui croient avoir tout essayé.
Je vous préviens cependant que ce système est plus éprouvant pour le mental que pour les muscles. Les répétitions maximales exigent l'emploi de toute la force physique et mentale et une concentration absolue.
Si un jour vous ne vous sentez pas mentalement préparé pour ce formidable effort, laissez les répétitions maximales pour un autre jour et entraînez-vous comme toujours.
Si vous effectuez correctement les reps maxi, elles vous permettront non seulement de surmonter les stagnements, mais de donner un incroyable coup de pouce à votre développement.
Bon courage donc et au travail !
Jerry YEUNG
Préparateur Physique "The Gym Tahiti"
Diplômé d'Etat BEES-1 Métiers de la Forme depuis 1998
IFBB Certified Advanced Bodybuilding & Fitness Trainer
Certified Trainer Institut Culture Physique Weider
IFBB International Judge
Plusieurs fois Champion IFBB en Bodybuilding National & International
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